Sur le coup des 10 heures ce mardi 29 septembre 2025, et sous un franc soleil, la cornemuse d’Alastair Kena, l’équipier en kilt d’Elena of London sonnait le ralliement des yachts de Tradition à la sortie du port de Saint-Tropez. Les 81 voiliers classiques répartis en 9 classes avec la goélette Atlantic en vaisseau amiral, entraient aujourd’hui sur la scène des Voiles de Saint-Tropez, précédés la veille par les Modernes et les Maxis. C’est encore une fois toute l’histoire de l’architecture navale qui défilait devant le Village sur le môle Jean Réveille. Communiqué de l’organisation

Inconditionnel de la Nioulargue, Eric Tabarly avait coutume de dire que se balader sur les quais de Saint-Tropez pendant l’événement, c’était comme « déambuler dans les pages d’un livre d’histoire maritime ». Démonstration encore à l’heure du déjeuner à la Tour du Portalet où après les départs au couteau des Modernes, se succédaient les yachts de Tradition.
Un grand voyage dans le temps et dans l’espace, du côté de New-York avec les P Class qui ouvraient le bal des Epoque Aurique, en passant par Fairlie en Ecosse où sont nés trois générations de plans Fife pour filer vers Sydney et Auckland avec les 12 m JI lancés en match-race sur la ligne comme au temps de leur splendeur (Perth, 1987!)
L’occasion de repérer quelques nouveaux venus comme Cariad, le grand ketch aurique d’Arthur Payne (36 m), de saluer le nouveau centenaire Leonora, Q Class sur plans Anker ou de se réjouir du retour de l’élégant Sumurun (Fife 35 mètres), maintenant aux mains de Jean-Pierre Dréau, ou du redoutable Spartan (22 m Herreshoff).
Le clou du spectacle arrivait à 13 h30 quand le comité lançait la dernière procédure de la journée, celle des Big boats, éligibles au Trophée Rolex. Si Cambria, seul sloop de cette flotte de 10 bateaux d’exception s’emparait rapidement de la tête, le passage d’Atlantic au ras du bateau comité, parfaitement lancé au coup de canon restera un moment de grâce, à jamais gravé dans l’histoire des Voiles de Saint-Tropez.
Maxis GP : La régate sinon rien !
Avec leur taille de 70 à 72 pieds, les Maxis GP forment un quintet de très haut niveau qui court presqu’en temps réel puisque les écarts de rating y sont infimes. Plus ancien de la catégorie, Jethou n’a pris une ride depuis 2012, maintenu au plus haut niveau par son propriétaire Sir Peter Ogden. Cette beauté noire dessinée par Judel Vrolijk, présente un rating médian et se montre toujours dangereux.
Vesper et Jolt sont les plus gros ratings. Le premier skippé par Jim Schwartz empochait hier la première manche des Voiles alors que Jolt, le plan Botinde Peter Harrison, n’est autre que le vainqueur l’an passé de la classe des grands Maxis qui intégrait alors les GP. Ces deux-là doivent moins de 3 minutes par heure de course à North Star de Peter Dubens ou Django X, le nouveau Wally Rocket 71 lancé cette année et récent vainqueur de la Maxi Yacht Rolex Cup.
Construit l’an passé chez King Marine à Valence, ce Maxi de 21,40 m est pourtant un pari osé. Moins long de 2 mètres et plus léger de 2 tonnes, c’est un peu le trouble-fête de la catégorie. La plus faible masse de lest est compensée par l’usage de ballasts de 2,7 tonnes par côté. «Le bateau est très à l’aise au portant et au reaching confirme Vasco Vascotto, le tacticien du bord. Mais pour gagner en régate, il faut arriver à survivre au près!» Pour cela, un soin tout particulier a été porté au transfert des masses d’eau, les 2700 litres passant d’un bord sur l’autre en seulement 6 à 7 secondes. Remplis dès 8 à 9 nœuds de vent réel et pas forcément utilisés à 100% de leur volume, les ballasts jouent un rôle de régulation. Vasco les compare à «l’action d’un équipier au trapèze qui joue sur la longueur de son câble!». Leur usage complique néanmoins la tactique, notamment pour le choix du côté de la porte sous le vent (quel ballast remplir à la fin du bord de portant ?) et le timing des passages pour ne pas traîner de masse en trop et retrouver la pleine puissance au près.
Modernes : Une première hiérarchie
Après deux jours de course où les petits airs ont redistribué les cartes, avec une victoire sans partage aujourd’hui de Vesper, Zen conforte sa place de leader chez les grands IRC et c’est très serré en IRC 1 entre Zappy S, Andante 4 et Arya. Dans les autres classes, ce sont Give Me Five (IRC2), Pride (IRC3) et Mikala (IRC4) qui occupent la première place ce soir.
A noter qu’il faut un minimum de quatre manches courues chez ces bateaux pour retirer du classement général son plus mauvais résultat.
Un jour, un bateau: Atlantic ou l’histoire en marche
Réplique de la goélette du record de l’Atlantique établi par Charlie Barr et ses 50 hommes d’équipage en 1905, Atlantic a été construite en acier entre 2007 et 2010 chez Van der Graaf (Rotterdam) pour le hollandais Ed Kastelein, mais n’avait jamais participé aux Voiles. «C’est sous l’impulsion de nos guests qui ont beaucoup apprécié le spectacle des régates l’an passé qu’il a été décidé d’inscrire Atlantic» raconte Fosse Fortuin, capitaine du yacht de 65 mètres depuis 2018, après avoir officié sur Elena of London aux côtés de Steve McLaren.
Pour cette première en régate, le bateau qui a changé de propriétaire l’an passé, a été convoyé en Hollande au chantier Talsma. Nouvelle peinture, changement du générateur, Atlantic a aussi entièrement déposé son gréement. Les haubans ont été changés ainsi que toutes les pièces suspectes des mâts en acier et un nouveau jeu de voiles plus plates commandé chez Zaoli à San Remo, sans oublier un gennaker de… 820 m2! Une garde-robe neuve qui confirme les qualités d’Atlantic, notamment dans la brise où avec ses seules voiles basses, la goélette peut tenir «des moyennes de 16 à 17 nœuds constant avec une douceur de mouvements et une sensation de sécurité incomparables» atteste Fosse.
Pour les Voiles de Saint-Tropez, le capitaine d’Atlantic a trouvé du renfort avec la présence à bord du maitre voilier italien Beppe Zaoli et d’une brochette de marins hollandais «ls viennent du chantier Talsma, ils ont une belle culture du maniement de grands yachts classiques dans des espaces réduits. Ce sont des colosses et leur aide est précieuse!» dit Fosse joignant le geste à la parole comme s’il brassait une écoute à la volée!
Avec 65 mètres hors-tout, les phases de départ nécessitent une attention toute particulière des 30 membres d’équipage pour trouver «la zone la plus dégagée possible» afin de lancer les quelques 300 tonnes du bateau propulsés par les 1 750 m2 des dix voiles. Une surface qui peut être portée à 2 600 m2 si l’on envoie le spi et les fisherman, une «voilure Hollywood!» comme la qualifie Fosse, conscient d’avoir entre les mains une icône du yachting.
Une fois les Voiles de Saint-Tropez achevées, Atlantic rejoindra les Caraïbes pour la semaine d’Antigua avant un retour par l’Ecosse en 2026 pour regagner la Méditerranée et courir probablement … les Voiles de Saint-Tropez! La suite sonne comme un rêve: «Le nouveau propriétaire est quelqu’un de très enthousiaste» assure Fosse Fortuin. « 2027 devrait nous conduire dans le Pacifique, avec au programme la Polynésie française, l’Indonésie, l’Australie et la Nouvelle Zélande avant un retour via l’Afrique du Sud et le Brésil…»
Programme des Voiles de Saint-Tropez 2025
Mercredi 1 octobre : Régates pour les voiliers Modernes et les voiliers Classiques, dont le Trophée Rolex
Day Off pour les Maxis
Jeudi 2 octobre : Club 55 Cup, Match Race Wally Rocket 51, Régate du Trophée Gstaad YC des Centenaires (départs décalés), Journée des Défis et pour les voiliers Modernes et les voiliers Classiques, Régates pour les Maxis
Vendredi 3 octobre : Régates Maxis, Modernes et Classiques, dont le Trophée Rolex
Samedi 4 octobre : Régates Maxis, Modernes et Classiques, dont le Trophée Rolex, Remise des Prix pour les Maxis
Dimanche 5 octobre : Remise des Prix pour les voiliers Modernes et les voiliers Classiques, dont le Trophée Rolex
Le programme et les résultats des Voiles de Saint-Tropez sont en ligne sur
https://www.lesvoilesdesaint-tropez.fr