Le Loup, né dans les années 30, était destiné à offrir un voilier bon marché aux régatiers du Bassin d’Arcachon. Près d’un siècle plus tard, ce joli dériveur continue de combler de plaisir bon nombre d’amoureux de la belle plaisance. Témoignage. Texte de Jean- Baptiste Douin. Photos de l’auteur.
Depuis longtemps, en hommes libres, nous chérissons la mer. Celle de l’Archipel de Bréhat, ce chapelet d’un millier d’iles bretonnes, aux lumières magiques de l’aube au crépuscule qui illuminent des roches de granit millénaire, aux marées incessantes qui changent continuellement les paysages, aux balades sous les embruns, aux longues pêches généreuses, aux baignades fraiches et revigorantes. Un lieu magique, chargé de souvenirs de vacances familiales.
L’exploration de ce coin préservé d’Armorique se fait depuis longtemps en bateau à moteur, mais il nous manquait une dimension. Celle du calme, du silence et de la sérénité d’un voilier qui glisse sur les eaux bleues de l’océan. Celle de moments de communion avec la nature. Celle qui provoque l’ikigaï des sens, cette méthode japonaise qui donne un sens à la vie.
Le projet a muri peu à peu tout au long de l’année 2021, durant d’interminables confinements et une période de transition dans ma vie. Je rêve d’un voilier, un beau voilier à fière allure. Un bateau sportif et racé. Un gréement adapté à Bréhat, au raffinement des lieux, mais aussi aux exigences de ses marées, de ses courants et de ses vents changeants.
Très vite mes recherches se concentrent sur un projet de day-boat. Si les lignes de quelques voiliers modernes et sportifs ne sont pas pour me déplaire, je penche plutôt vers les lignes plus classiques et légères de vieux gréements. Requin, Cormoran, Dragon, Tofinou, je tombe finalement ébahi devant le Loup. Ce voilier n’a pas pris une ride depuis le coup de crayon d’Angelo Salmoiraghi il y a près de 100 ans.
Avec l’aide d’un ami, Benoit Le Banner, des chantiers Nauti-Breiz à Perros-Guirec, bien plus connaisseur et technicien sur la question, nous nous mettons à la recherche les Loups d’occasion à rénover. Je découvre la «meute», la communauté des Loups, qui rassemble les propriétaires de Loups. La meute est emmenée par Pierre Laforie, un passionné. Elle a même son site: ClassLoup. Tous les propriétaires de Loup avec qui j’ai pu échanger sont des passionnés, des gens discrets et amoureux de leur voilier. Tous décrivent le petit supplément d’âme de ce vieux gréement élégant et sportif. Tous semblent communier avec leur bateau qui leur offre de très belles sensations.
Bien que le Bassin d’Arcachon, berceau du Loup, est bien loin de notre Bretagne Nord, je découvre qu’à Bréhat même, deux heureux propriétaires de Loup jouissent du plaisir de naviguer sur ce bateau élégant et savent en parler avec un mélange d’humilité et de passion: France Gainioux et Pierre Le Picard. A chaque fois, c’est une rencontre enrichissante. Chacun dans une quête très personnelle: l’une le calme des balades en mer, proches de la nature, l’autre la navigation sportive des régates.
Ma recherche d’un beau Loup d’occasion n’est pas fructueuse mais me permet de faire la plus belle des rencontres : Franck Roy. Il a assuré la maintenance et la restauration de la plupart des Loups existants. Depuis qu’il a cédé son chantier, il a remonté un atelier de maintenance et d’entretien de voilier: YCR (Yor Classic Refit). Si tous ceux qui ont côtoyé le Loup sont passionnés, Franck lui est habité. Un artiste qui connait le Loup par coeur. Au fil de longues heures d’échanges autour de projets de rénovations lourdes de vieux Loups d’occasion, j’apprends à connaitre et respecter l’homme (qui fut désigné «Yachtman de l’année 2016» par YACHTING Classique). Cet artisan a vu passer de nombreux vieux gréements dans ses mains et j’écoute ses conseils. Le projet de rénover un vieux Loup s’avère plus compliqué que prévu et nous caressons l’idée d’un bateau neuf.
Début 2022, une opportunité permet à Franck Roy de racheter les moules de la coque du Loup lors de la liquidation de son ancien chantier naval. Nous échafaudons le projet de construire un Loup neuf. Son carnet de commande est d’ores et déjà plein d’engagements de rénovations pour les 6 ou 7 mois à venir. Mais il accepte de s’attaquer à la construction d’un Loup dès l’automne pour une livraison au printemps suivant. …
…La suite à lire dans YACHTING Classique N°97