HONNEURS – Quand on a possédé à huit ans, un petit dériveur en acajou, dénommé Cocotte, c’est qu’on appartient bien à la famille du yachting classique. Au-delà de l’admirable réussite du club 55, qui a donné naissance à la Nioulargue, elle-même matrice des Voiles de Saint-Tropez qui fêtaient de belle manière leur 20 ans en septembre dernier, ce petit voilier aura été déterminant dans la vie de notre personnalité de l’année. Par François Le Brun – YACHTING Classique n° 83
Patrice de Colmont méritait bien, à son corps défendant, le trophée de Yachtman de l’année. L’histoire est bien connue: un défi est lancé en 1981, entre les équipages du Swan 44 Ryde, appartenant à l’Américain Dick Jason, et Ikra, le 12 metre JI appartenant à̀ Jean Rédélé, et skippé en ce temps-là par le légendaire Jean Lorrain. L’année suivante, la flotte des maxis, qui régatent plus habituellement à Porto Cervo dit banco à une venue massive à Saint-Tropez. Parallèlement, les skippers des plus beaux yachts classiques naviguant en Méditerranée manifestent leur engouement pour un rassemblement. Suivra une décennie d’années folles. La notoriété de la Nioulargue est mondiale, au point que certains seraient tentés de l’écrire comme une épreuve anglo-saxonne dédiée à la course au large : la new largue. Mais non, c’est une bouée au large de Saint- Trop’, qui indique la présence d’un haut fonds. En somme, c’est le nid du large en provençal.
Comme l’oeuf et la poule
Mais pourquoi spécifiquement cette bouée symbolique, et comment la magie a -t-elle immédiatement opéré? Les réponses nous ramènent immanquablement à Patrice de Colmont, et c’est bien pourquoi il est notre yachtman de l’année.
Comme de l’œuf et de la poule, on ne sait pas trop qui a commencé. Nous partirons de Cocotte, le petit dériveur en acajou que Patrice possédait enfant. Mais auparavant, il conviendrait de préciser que Bernard, le père de Patrice, appartenait à la caste du Club des explorateurs. Il avait été le premier occidental à entrer en contact avec les indiens Lacandos en 1935.
Douze ans plus tard, en 1947, pour se faire un peu d’argent, il tourne en Méditerranée un documentaire à bord d’un bateau de transport à voiles majorquin. Une tempête de mistral l’oblige à s’abriter dans la baie de Pampelonne. Subjugué par la beauté des lieux déserts, il décide de revenir avec sa famille, pour s’y installer à̀ demeure, d’abord sous une tente, puis dans une cabane en bois flotté. Un jour, il dit à̀ Patrice « à ton âge, les jeunes Lacandos apprennent faire leurs arcs et leurs flèches pour se nourrir. Fais la même chose»! Sur Cocotte, Patrice va donc partir pêcher, naviguer, dormir, notamment aux abords de la Nioulargue.
Video à voir: https://www.youtube.com/watch?v=-FtxDEUx6hs
Dans le sillage de Brigitte bardot
Survient ensuite l’épisode Vadim. En 1955, pour le tournage de «Dieu Créa la femme», l’équipe technique a besoin d’une personne miraculeuse capable d’assurer la restauration de 80 personnes dans un lieu où il n’y a rien. Geneviève, la mère de Patrice n’est pas impressionnée par le défi. Au contraire, elle est amusée. Les germanopratins de l’équipe de tournage sont si heureux qu’ils en parlent de retour chez Castel et au Café de Flore. Ils reviennent l’année suivante et de nouveaux « tendanceurs », comme on dit désormais, affluent dans le sillage de Brigitte Bardot. Le Club 55 est né, en référence à l’année de tournage, avec le succès que l’on sait.
Las, Bernard décède prématurément. Patrice revient aider sa mère. Il ne repartira pas, imprimera sa marque, recevant le monde entier avec les mêmes égards, pourvu que la bonne humeur et la bienveillance soient au rendez-vous. Un jour de 1981, il compte, parmi ses clients du bar en bois flotté, deux équipages de voileux. Ce sont les équipiers de Pryde et d’Ikra. Ils se disputent gentiment sur la vitesse respective de leurs bateaux….
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Et voici la vidéo de Sylvie Bourgeois Harel dans laquelle Patrice de Colmont raconte la Nioulargue
https://m.youtube.com/watch?v=-FtxDEUx6hs