Altair survole la Panerai Transat Classique et ne va plus lâcher le morceau . Sauf gros incident, le suspense n’est plus de savoir qui va gagner mais qui va compléter le podium.
Avec la confirmation d’une diminution des alizés sur la route vers la Martinique, les concurrents de la Panerai Transat Classique 2015 vont sans doute revoir leurs estimations d’arrivée et les reculer de quelques heures. Le leader, Altair, devrait ainsi franchir la ligne à Fort-de-France dans la soirée de lundi (heure locale), si toutefois les vents ne s’affaiblissent pas trop. Au dernier pointage, en temps compensé, Adventuress est à 8 heures, Argyll à 11 et Gweneven à une demi-journée. Pas grand chose l’échelle d’une traversée océanique mais vu le talent et l’envie développée par l’équipage d’Altaïr, et sauf gros incident technique , ont voit mal comment, cette Transat pourrait échapper à ce magnifique plan Fife.
Empannages en série Dans les dernières 24 heures, Altair a empanné deux fois pour reprendre un peu de Nord et se recaler sur la route directe. Amazon et Adventuress ont pu maintenir l’écart qui les sépare du leader, mais la lutte qui les oppose reste plus indécise que jamais avec à peine 20 milles de différence. Faïaoahé en a fini d’aller « braver les frimas de l’Arctique », comme le dit Jeremiah Bailey dans son dernier message, et a empanné vers le Sud pour se mêler à la bagarre entre Argyll, Corto, The Blue Peter et Gweneven, regroupés sur 80 milles. Tous affichent des moyennes supérieures à 8 nœuds. Et il faut aussi se méfier de Vagabundo II, actuel 5e du classement en temps compensé, et de Desiderata qui, sans faire de bruit, réalisent un très beau parcours et qui, à l’approche de l’arrivée peuvent trouver d’autres motivations pour remonter la flotte.
Adventuress, l’autre plan Fife de cette transat avec Altair, n’a pas perdu tout espoir de gagner en temps compensé mais ce sera très dur. Cette unité restera l’une des très belles découvertes de cette Panerai Transat Classique 2015. Adventuress, magnifique plan de William Fife III, est une goélette aurique de 31 mètres hors-tout, nouvelle venue, ou plutôt revenue dans l’univers des classiques puisqu’elle sort d’une longue restauration au chantier américain de Rockport Marine, dans le Maine. Née en 1924, sur les bords de la Clyde, à Fairlie, le fief de la dynastie Fife, en Ecosse, Adventuress est dotée à la construction d’une grand voile marconi sur le grand mât et d’une voile aurique sur le mât de misaine. Son histoire reste méconnue, mais cette goélette fut réquisitionnée comme patrouilleur par les Allemands pendant la Deuxième Guerre mondiale avant d’être sabordée (par les Allemands ou les Français) à l’entrée du port de Villefranche-sur-Mer. Renflouée en 1950, le bateau est restauré et regréé en ketch avant de partir sillonner la côte Est des Amériques, des Caraïbes jusqu’à la Nouvelle-Angleterre, sous le nom d’Isabel. Il est alors racheté par son actuel propriétaire qui décide de lui donner un plan de voilure de goélette aurique. Au-delà d’une simple restauration, son armateur envisage Adventuress comme le support d’une philosophie pour retrouver l’apprentissage de la vie et l’art de la navigation de nos Anciens. Emmené par son Capitaine, Seth Salzmann, le jeune équipage, élevé à l’école du partage, de l’entraide et la tradition, va donner du fil à retordre à ses adversaires.
Adventuress en chiffres : Type : goélette aurique -Chantier : William Fife & Son- Année de construction : 1924- Architecte : William Fife- Matériau de la coque : Bois- Longueur hors tout : 31.10 m -Tirant d’eau : 3,50 m
Classement en temps réel au dernier pointage du 17 Janvier 2015 à 8h GMT ( Entre parenthèses classement en compensé) : 1 (1) : Altaïr (1931) : à 555, 5 m de l’arrivée – 2 (7): : Amazon (1971), + 213,9 m – 3 (2): Adventuress (1924), + 264,0 m– 4 (10) : Faiaoahe, + 352,8, m , -5 (3) : Argyll (1948) , + 366,0 m: – 6 (5): Corto (1970) , + 398, 9 m – 7 (8): The Blue Peter (1930), + 412,7 m – 8 (4) : Gweneven ( 1975), +442,2 m – 9 (6): Vagabundo II (1945) , +493,3 m – 10 (9) : Desiderata (1975), + 530,4 m.
Ils ont dit :
Argyll : « Bonjour. Chez nous, il fait un temps splendide, sans grains, avec 20 nœuds de vent ! Nous sommes en mode Récupération, avec un bateau qui va vite et sur la route ! On va dormir un max pendant 2 jours pour être au top pour le dernier tiers de la course. Il fait chaud ce matin, la température de l’eau est à 23,5° ! On a juste croisé tout prés un porte-container et des poissons volants, dont un sur le pont. Bref, c’est paisible, le bateau dévale les pentes à un rythme soutenu ! Je pense à très bientôt : nous devrions arriver le 23 et chacun a fait son pari pour l’arrivée ! Voilà, je souhaite à tous beaucoup de plaisir. Argyll »
Altair : Ted ( barreur et équipier d’avant) : « Qui aime naviguer sur une goélette ne peut pas espérer mieux. Les classements quotidiens et les repas sont les temps forts de la journée, mais ne pas croire que foncer au portant dans plus de 30 nœuds de vent peut devenir monotone. Entre les changements de voiles et les heures à barrer la « jeune fille » , nous n’avons pas à d’organiser un programme d’exercices physiques. Surtout que nous avons essayé de porter autant de toile que, sans avoir à nous lamenter d’en voir exploser… En guise de divertissement, nous sommes montés tout au bout de la corne (vergue supérieure d’une voile aurique, ndlr), au bout de la bôme, du haut en bas de chaque mât pour résoudre différents pépins, tout en faisant des inspections quotidiennes du gréement et en organisant des patrouilles « anti-usure » sur le pont. L’esprit de compétition de notre propriétaire ne laisse aucun doute tant il savoure, mais aussi tant il en veut plus. Allez-y ! Bonne chance et bon vent à tous nos concurrents et nous espérons qu’ils ont au moins la moitié du plaisir que nous avons. »
.Jeremiah Bailey, Adventuress « Les vents du changement. Gîte et plonge et redresse et vibre, glissant deçi-delà durant les heures nocturnes. Etire la vitesse sur la déferlante d’une vague. Remonte dans le vent, augmente la pression, prends de la vitesse, puis retombe loin dans le vent, juste à éviter un empannage inopiné. Quelques milles difficiles, mais chacun des deux derniers quarts de l’aube se sont levés sous un ciel doux et gris et de lourds nuages apportant le parfum de la pluie et l’espoir d’une augmentation favorable du vent. Il n’y a pas de rails immergés et il faut s’accrocher à la barre. Un quart de tour à tribord, un demi-tour à bâbord, du coin de l’œil guette le coup de pied d’une vague par l’arrière, écoute ce que raconte le flottement d’un drapeau, note la direction du vent, sa vitesse et celle du bateau sur les répétiteurs, sens la brise claquer sur ta joue, fais monter l’étrave, laisse filer la barre, laisse descendre la poupe, stabilise la course et garde les voiles pleines. […] »